Et si vous misiez sur le Content marketing ?
Pour gagner en visibilité et se constituer une communauté fidèle, rien de tel que les blogs et les réseaux sociaux. La condition étant de proposer régulièrement des contenus de qualité. Un marché prometteur pour les pros de la communication digitale.
Je m'abonneIl faut en avoir dans le pantalon pour relancer aujourd'hui la plus ancienne marque de jeans française face aux mastodontes américains et aux sous-traitants asiatiques. C'est le risque que vient de prendre Julien Tuffery, 29 ans, arrière-petit-fils du créateur de l'atelier de confection Tuff's, en Lozère. Mais si le savoir-faire date de 1892, les moyens de communication sont, eux, ceux de sa génération. Un blog pour le storytelling façon terroir, Facebook et Twitter pour mettre en valeur la récente participation de Tuff's au salon du made in France, YouTube pour démontrer reportages à l'appui que la production est bien locale, Instagram pour ceux qui veulent se photographier avec leur Tuff's... Bref, Julien Tuffery joue la carte du "content marketing", comme on dit au pays du Levi's. Ce qui consiste à diffuser sur tous les canaux numériques existants (site, blog, réseaux sociaux) des contenus originaux liés non plus seulement à ses produits, mais aussi à ses valeurs. Textes, photos, vidéos, tutoriels et même jeux répondent ainsi à une ligne éditoriale. Avec pour objectif, évidemment, de fédérer une communauté de clients fidèles et susceptibles de devenir prescripteurs. Du marketing 3.0 auquel se convertissent aujourd'hui les agences de webcommunication pour répondre à une demande croissante.
Affinités
De grandes marques ont ouvert la voie en investissant des sommes considérables, comme Airbnb avec son webguide des quartiers des grandes capitales. Les start-up ont suivi en pratiquant le système D, à l'image de Jimini's, qui commercialise des insectes comestibles et dont le blog est une mine d'or sur la question. C'est au tour des PME de se lancer, à la hauteur de leurs moyens et en faisant appel la plupart du temps à des professionnels. "Si tout le monde n'a pas forcément compris l'importance des contenus, on assiste à une véritable prise de conscience, estime Franck Rolland, créateur de l'agence Parker + Parker, présente à Paris, Lyon et Bordeaux. Et alors que la publicité traditionnelle devient transparente, les gens n'ont jamais été autant en demande de contenus. Internet est devenu un loisir, on regarde la télé sur sa tablette et on s'amuse à naviguer. C'est là qu'on peut vraiment entrer en connexion avec ses clients. Si je trouve une marque sympa, si elle m'informe avec des articles pratiques ou qu'elle me divertit, je vais m'y attacher. Je vais en parler à mes amis, partager les posts. Avec de bons contenus, on peut structurer sa réputation, fédérer une communauté et même apparaître sur la première page de Google."
L'avis de Guillaume Gibault (Le Slip français)
Le contenu, c'est la clé pour exister sur Internet et les réseaux sociaux. Il faut sans cesse intéresser sa communauté, créer des produits, des partenariats, des pop up stores, rebondir sur ?l'actualité, la météo... Il faut avoir un contenu riche et de qualité à diffuser sur la bonne plateforme au bon moment : newsletter, Facebook, Instagram, Twitter... C'est un full time job !
Valeur ajoutée
Des objectifs qu'on peut atteindre en se passant des services d'une agence. À condition de disposer en interne de temps et de compétences. Ce qui est très rarement le cas des PME. "Avoir un blog et poster des vidéos sur YouTube, c'est à la portée de tout le monde, souligne Florence Antunes, créatrice de webcontenus basée dans le Vaucluse. Mais attention, il faut impérativement de la régularité. Et si on poste des articles mal écrits sur un blog moche ou qu'on met en ligne de très mauvaises vidéos, ça peut être complètement contre-productif. De plus en plus d'entreprises comprennent que les contenus ont une grande importance, à condition qu'ils apportent vraiment de la valeur ajoutée. Et ça, c'est un métier..." Et un métier d'avenir. Pour preuve, les agences de webcommunication ne se contentent plus de promettre à leurs clients des sites vitrines ou même d'e-commerce bien léchés. Elles mettent quasiment toutes en avant leur capacité à produire des contenus pertinents, originaux, décalés. Comme l'agence parisienne Hippocampe, qui reconnaît que les clients font souvent la grimace lorsqu'on leur explique qu'en plus d'investir dans l'élaboration d'une stratégie et la mise en place des outils numériques, il va leur falloir dégager un budget annuel pour les nourrir. "Sauf qu'un beau site avec des contenus mal fichus, on ne fait qu'y passer, ajoute Pascale Gemignani, responsable du pôle éditorial d'Hippocampe. De? bons contenus, c'est de l'investissement, du temps de cerveau, et donc de l'argent..."
Rentable
"C'est encore quelque chose de neuf pour pas mal de dirigeants mais, petit à petit, ils comprennent que le renouvellement de contenus de qualité doit être complètement intégré à leur stratégie marketing et que ça a un coût, ajoute Guillaume Eouzan, créateur de l'agence Mind-fruits, basée à Aix-en-Provence. On leur explique que choisir d'investir dans du marketing de contenus ce qu'on mettrait dans le salaire d'un commercial, c'est beaucoup plus rentable. Non seulement on se donne de la visibilité, mais en plus, l'entreprise va générer des demandes entrantes au lieu d'aller chercher des prospects." Et Guillaume Eouzan est confiant. Car celles qui franchissent le pas obtiennent d'excellents retours. Et n'envisagent pas une seconde de revenir au vieux site à papa.
À savoir
Dans le cadre des Investissements d'avenir, l'État a lancé l'appel à projets "Économie circulaire, recyclage et valorisation des déchets", ouvert jusqu'au 21 novembre 2016. L'objectif : financer des projets innovants afin de mettre sur le marché d'ici 2 à 5 ans des produits ou services innovants.
Découvrez trois exemples de content marketing réussis et le témoignage de Julien Pilati, traiteur dirigeant de Entre amis, en page 2
Témoignage de Julien Pilati, dirigeant de la SARL Entre amis (traiteur)
Avoir officié dans des restaurants étoilés, en particulier chez Hélène Darroze, ça vous pose un chef. En s'installant à son compte comme traiteur dans le Vaucluse il y a huit ans, Julien Pilati s'est donc naturellement positionné sur le marché du très haut de gamme. Et a eu besoin de le faire savoir, car la clientèle de la région n'y aurait pas suffi.
"Nous avons toujours été présents sur le Web et c'est grâce à ça que nous avons connu une forte croissance les trois premières années, explique le jeune chef. Mais aujourd'hui tout le monde s'y est mis, en particulier les traiteurs milieu de gamme qui reprennent des argumentaires haut de gamme. Comme il faut toujours avoir un train d'avance et innover, nous avons lancé il y a quatre mois une stratégie de contenus de qualité, avec un blog et une forte présence sur Facebook. C'est utile pour le référencement mais ça sert surtout à soigner notre image et montrer la diversité de nos savoir-faire, ce qui n'est pas toujours possible sur le site."
Julien Pilati réalise à peine 15 % de son chiffre d'affaires dans sa région et a donc besoin d'une forte visibilité à l'échelle nationale, de Monaco à Paris. Sans oublier les propriétaires de résidences secondaires dans le Midi, qui peuvent ainsi le découvrir depuis la Belgique ou l'Angleterre.
Résultat, son budget communication a grimpé jusqu'à 40000 euros par an. "C'est cher, oui, mais être leader ça coûte forcément de l'argent, relativise-t-il. De toute manière, aujourd'hui, il n'y a que les médias numériques qui marchent. Ça permet de faire découvrir notre marque et ensuite d'inciter la clientèle à passer à l'acte ou, au moins, à demander un devis. Pour moi, désormais, soigner ses contenus ce n'est plus un choix, c'est une obligation."
Trois exemples de content marketing réussis
Alter Eco
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Alter Eco, distributeur de produits alimentaires bio et équitables, a lancé un blog expert baptisé Alter Echos. Les recettes de cuisine élaborées avec ses produits s'y mélangent aux articles de fond sur les enjeux de la COP21 ou la philosophie du "zéro déchets". Une manière astucieuse pour cette entreprise de la région lyonnaise de s'assurer un fort capital affectif. Résultat, elle compte près de 64000 fans sur Facebook !
Babolat
Facebook, Twitter, Pinterest, Instagram, YouTube... Babolat, numéro un mondial des cordages de raquettes de tennis, fait feu de tout bois sur les réseaux sociaux pour se constituer une immense communauté de passionnés, où les grands champions côtoient les amateurs. Cette entreprise lyonnaise en a profité pour recueillir, dès le stade du développement, les réactions de ses "followers" sur une innovation majeure, sa raquette électronique connectée à un smartphone.
Couture Lin
Fabricant et éditeur de tissus 100% lin made in France, Couture Lin soigne sa clientèle de particuliers à l'aide d'un blog très fourni. On y trouve en particulier des tutoriels aidant à réaliser, étape par étape, du linge de maison, des vêtements ou des déguisements pour les enfants, en lin évidemment. Et sur les réseaux sociaux, les adeptes du "home made" peuvent partager leurs propres créations et donner des idées à de nouveaux clients.