Pandémie : pourquoi les assurances ne s'appliquent-elles pas ?
Les pertes liées à l'épidémie de Coronavirus ne sont pas assurées. Une mauvaise nouvelle pour tous les professionnels qui l'ignoraient. Le Gouvernement a sommé les assureurs de participer à la solidarité nationale et trouver un nouveau système pour indemniser les catastrophes sanitaires à l'avenir.
Je m'abonneDepuis quelques semaines, les restaurateurs, cafés, hôteliers... sont dans l'inquiétude. Les pertes financières liées à la fermeture de leurs établissements sont sans précédent. Elles se chiffrent en dizaines de milliards d'euros. Et la grande majorité des professionnels ont eu la surprise de constater que leur contrat d'assurance ne s'appliquerait pas dans la situation actuelle. Sous la pression des pouvoirs publics, certains assureurs ont concédé des gestes. Et le gouvernement a sommé de secteur de réfléchir à la construction d'un état de catastrophe sanitaire.
La difficulté d'assurer les pertes d'exploitation sans dommage
68 % des dirigeants ignoraient que les épidémies n'étaient pas couvertes par les contrats d'assurance(1). Un coup de massue pour ces chefs d'entreprises, artisans, indépendants, auto-entrepreneurs... qui espéraient faire jouer leur garantie perte d'exploitation suite à l'arrêt de leur activité. Mais pour les assureurs, la perte d'exploitation est un sinistre qui survient consécutivement à un dommage matériel : un incendie, un bris de machine, la chute d'un arbre, une explosion... Alors que dans la situation actuelle, l'activité a soudainement été stoppée "sans casse" : les salariés ont été confinés, les voyages annulés, les événements culturels reportés. Pas de pertes "matérielles" au compteur.
Des pertes chiffrées à 60 milliards d'euros
La perte d'exploitation dite "sans dommage" est très rarement couverte par les contrats d'assurances. Et quand c'est le cas, ses capacités financières sont très limitées. On parle de quelques millions d'euros seulement, alors que l'impact de la pandémie pour les entreprises est évalué à près de 60 milliards d'euros. Pourquoi ? Car il est très difficile pour un assureur de modéliser un risque immatériel. Qui plus est lorsqu'on parle de pandémie. D'une part sa fréquence est telle qu'elle ne permet pas d'en tirer des statistiques, et d'autre part son ampleur est si importante qu'on ne peut pas lui appliquer le principe fondamental de mutualisation. Aussi, bien souvent, le risque pandémique, qui touche tout un système, est exclu des contrats.
Le Gouvernement monte au créneau
Interpellées par le Président et le ministre de l'Économie et des Finances à plusieurs reprises, les assurances ont rappelé qu'indemniser les entreprises sur la base de cotisations non payées pourrait mettre tout le secteur en péril. Néanmoins, les compagnies se sont mobilisées au-delà de leurs engagements contractuels, et ce à plusieurs reprises. Parmi les mesures prises, 400 millions d'euros seront reversés au fonds de solidarité créé pour les TPE et indépendants, les garanties des contrats sont conservées pour les professionnels qui ont des difficultés de paiement, des mois de loyers sont reportés...
Un nouveau modèle à inventer
Le secteur du tourisme est en discussion avec la Fédération Française de l'Assurance pour apporter des solutions concrètes au secteur. Par ailleurs, une commission vient d'être lancée pour étudier la mise en place d'un état de catastrophe sanitaire, basé sur le modèle des catastrophes naturelles. Dans ce système, l'Etat devra s'engager aux côtés des assureurs. Mais cela ne sera applicable qu'à la prochaine pandémie. Et personne ne peut encore prédire quand elle surviendra...
Pour en savoir plus
Olivier Moustacakis est cofondateur d'Assurlandpro.com, comparateur d'assurances pour les professionnels.
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