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Fautes de gestion : les pièges à éviter

Publié par le | Mis à jour le

Les fautes de gestion, qui recouvrent tout acte ou omission d'un diri­geant contraire à l'intérêt de l'entreprise, peuvent avoir des conséquences préjudiciables. Pour faire face à ce risque, il convient de prendre plusieurs précautions.

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Fautes de gestion : les pièges à éviter

En tant que dirigeant, il vous incombe de toujours surveiller votre activité, au risque d'être tenu pour responsable en cas de faute de gestion. Si cette notion n'est en effet pas clairement définie par la loi, l'étude de la jurisprudence permet d'en déterminer les contours. Il s'agit « d'un acte frauduleux, d'une omission, d'une négligence ou d'une imprudence qui vont dans le sens contraire des intérêts de l'entreprise. Les fautes du dirigeant apparaissent souvent à l'occasion d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire dont la société peut faire l'objet », explique Jean-Luc Scemama, expert-comptable au sein du cabinet Expertise et Conseil. Il existe précisément trois fautes de gestion :

- La faute de gestion par négligence est souvent invoquée quand la situation de l'entreprise est due à la passivité du dirigeant en matière de tenue de la comptabilité. « Plus généralement, cette faute de gestion concerne des dirigeants qui se désintéressent par négligence de la situation financière de l'entreprise et prennent des décisions trop tardives », détaille Didier Paureau, spécialiste de l'entreprise en difficulté et fondateur du site Jivaro Europe. Ainsi, sont caractérisées comme fautes par négligence des commandes trop importantes passées par le gérant alors que la société est ­déficitaire, ou encore le défaut de paiement des cotisations sociales.

- La faute de gestion par commission concerne des décisions et des actes de gestion effectués en connaissance de cause et qui sont contraires à l'intérêt de l'entreprise. Ainsi, une rémunération abusive, le non-dépôt des comptes sociaux au Tribunal du commerce pour masquer la situation financière de la société, la non-convocation d'un associé à l'Assemblée générale, l'augmentation des dépenses malgré une situation financière en déficit, des emprunts qui dépassent les possibilités de remboursement de l'entreprise, ou encore le fait de ne pas mettre à disposition des salariés des équipements de protection individuelle quand la profession l'exige (chaussures de sécurité, casques de chantier) sont autant de faits qui peuvent être considérés comme une faute de gestion par commission.

- La faute de gestion frauduleuse peut être invoquée, en cas d'abus de biens sociaux, d'établissement de comptes sociaux inexacts ou incomplets ou encore de détournement d'actif. « Dans ce cas précis, un associé peut se sentir lésé et demander au tribunal de commerce que des vérifications soient effectuées », commente Didier Paureau. Ces fraudes peuvent également concerner le droit des affaires (distribution de dividendes fictifs), le droit du travail (travail dissimulé) et le droit fiscal (revenus non déclarés).

Quelles sont les conséquences ?

Ces actes, plus ou moins graves, ne sont pas sans conséquences. S'il s'agit d'une faute de gestion par négligence ou par commission, le dirigeant peut être condamné par le tribunal de commerce à verser des dommages et intérêts. En revanche, un acte frauduleux met directement en cause la responsabilité civile et pénale du chef d'entreprise. « Des dommages et intérêts et une interdiction de gérer une entreprise pour une période pouvant aller de deux à dix ans peuvent être exigés par le juge. Ce dernier peut même décider de mettre à la charge du dirigeant tout ou partie des dettes sociales de l'entreprise. C'est ce que l'on appelle l'action en comblement de passif », explique Didier Paureau (Jivaro Europe).

En présence d'une insuffisance d'actif, cette action oblige les dirigeants à supporter tout ou partie du passif social de la société sur leur patrimoine personnel. Sachez également qu'un dirigeant de fait, qui dispose par exemple d'une procuration bancaire sur les comptes de la société, encourt les mêmes sanctions qu'un dirigeant de droit.

Comment éviter la faute de gestion ?

La faute de gestion n'est donc pas sans risques. Ainsi, il convient de prendre cinq précautions. Dotez-vous en premier lieu de tableaux de bord. Ce sont des outils de pilotage essentiels qui vous informent de la santé de votre entreprise en termes de rentabilité, de trésorerie et vous permettent d'identifier les dérives éventuelles. " Le dirigeant pourra ainsi surveiller son besoin en fonds de roulement et tenter de le réduire le plus possible. Pour cela, il existe plusieurs leviers : limitation de l'importance des stocks et de leur durée, augmentation du délai de règlement des dettes envers les fournisseurs et, enfin, réduction du délai de recouvrement des créances sur les clients ", rappelle Jean-Luc Scemama (cabinet Expertise et Conseil).

Vous pouvez en deuxième lieu mettre en place des procédures de contrôle pour détecter d'éventuelles erreurs. Un expert-comptable peut ainsi mener un audit interne sur certaines fonctions afin d'apprécier leur qualité, leur fiabilité et déterminer, compte tenu des faiblesses et risques constatés, un plan d'amélioration. Cette tâche ne contredit en rien l'audit légal du commissaire aux comptes. " Cette démarche est un point positif pour les juges lorsqu'ils sont face à un dirigeant mis en cause. Ils apprécieront sa volonté de limiter les risques par une gestion de la qualité dans la réflexion et la ­réactivité ", commente ­Jean-Luc Scemama.

Troisième recommandation : gardez un oeil sur vos associés. Dans le cas d'une cogérance, votre responsabilité sera engagée pour faute de gestion si vous avez laissé agir votre cogérant sans contrôle. Si ce dernier détourne, par exemple, des fonds de la société, votre inaction et votre manque d'intérêt pour la situation de l'entreprise pourraient être mis en cause. En cas de désaccord avec votre associé, pensez à faire des ­notifications écrites pour le ­justifier, le cas échéant, de manière officielle.

Soyez par ailleurs rigoureux sur les salaires. Les rémunérations disproportionnées par rapport aux résultats prévisionnels de l'entreprise peuvent se transformer en faute de gestion. " La rémunération du dirigeant doit tenir compte de la situation de l'entreprise. Si celle-ci traverse des difficultés, elle doit être modulée ", estime Didier Paureau.

Enfin, gardez une trace de l'ensemble de cette gestion (e-mails, notes de synthèse, études de marché, choix des devis). Pour faire face à une éventuelle mise en cause pour faute de gestion, mieux vaut conserver des preuves. Ces éléments seront toujours utiles pour justifier vos choix et vos décisions en matière de gestion et de stratégie de l'entreprise. Des garde-fous existent donc pour préserver la santé financière de votre entreprise et votre réputation.

 
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