[Tribune] Modification du contrat ou des conditions de travail : où s'arrête le pouvoir de l'employeur?
Les besoins fluctuants de l'employeur peuvent justifier une modification des conditions d'emploi de son personnel, au cours de l'exécution du contrat de travail. Dès lors, il n'est pas toujours aisé de déterminer la juste limite entre le pouvoir de direction de l'employeur et les droits du salarié.
Je m'abonneLa figure de l'employeur est à l'image de celle d'un chef d'entreprise usant de son pouvoir de direction aux fins de parvenir à une activité productive et fructueuse, dans le respect du bien-être de ses salariés. Le pouvoir de direction de l'employeur s'analyse en la faculté d'organiser, de contrôler et de commander une prestation de travail. Il tire directement sa justification du contrat de travail et du lien de subordination en découlant.
En application de ce pouvoir, l'employeur peut procéder au changement des conditions de travail de l'un de ses salariés. Il peut ainsi librement fixer une nouvelle répartition des horaires de travail ou prévoir la mutation d'un salarié dans une succursale proche. Néanmoins, ce changement ne doit pas constituer une atteinte excessive à la vie privée du salarié, c'est-à-dire à sa vie personnelle ou familiale ou à son droit au repos.
L'impossible modification unilatérale du contrat
Le pouvoir de l'employeur au sein de la relation de travail se voit néanmoins limité en cas de modification du contrat de travail lui-même, pour laquelle l'accord du salarié est indispensable.
L'employeur ne peut ainsi pas modifier de manière unilatérale un ou plusieurs éléments essentiels du contrat de travail. Pas de risque donc pour le salarié de se voir imposer une baisse de sa rémunération, un changement de sa durée de travail ou de la nature de ses fonctions, telles que mentionnées dans son contrat de travail. Quant au lieu de travail, lorsque le salarié n'est pas soumis à une clause de mobilité, l'affectation du salarié dans un secteur géographique différent nécessitera une fois de plus l'accord de ce dernier.
L'exercice du pouvoir disciplinaire de l'employeur ne peut pas non plus justifier une modification unilatérale du contrat de travail. Il n'est ainsi pas possible de sanctionner un salarié en supprimant une partie de sa rémunération ou en procédant à une mutation lointaine.
Quelles conséquences en cas de refus du salarié ?
Lorsqu'un salarié se voit proposer une modification de son contrat de travail, il peut librement choisir de l'accepter ou au contraire y opposer un refus. Si tel est le cas, l'employeur dispose à son tour d'une option puisqu'il peut renoncer aux mesures envisagées ou lancer une procédure de licenciement à l'encontre du salarié. L'employeur doit alors motiver sa décision, en indiquant notamment les raisons justifiant la modification du contrat. Enfin, le refus du salarié quant au changement de ses seules conditions de travail s'apparente à une faute, susceptible de conduire à son licenciement.
L'équilibre entre les besoins de l'entreprise et les droits du salarié nécessite un maniement habile des règles juridiques. S'entourer des conseils d'un avocat en droit du travail vous assure alors des solutions adaptées à votre situation, ainsi qu'une défense efficace de vos intérêts en cas de litige.
L'auteur
Charlotte Martineau, Juriste chez Avocats Picovschi, cabinet d'avocats d'affaires créé en 1988 par Gérard Pivoschi, compétent en droit des sociétés, droit social, droit fiscal, droit international, PLA... et qui développe ses savoirs faire à destination des entreprises françaises et internationales.