Eric Kayser, p-dg de Maison Kayser : "Je veux conquérir la Chine en 2018"
Eric Kayser est devenu l'ambassadeur du bon pain à la française. Au Japon ou aux Etats-Unis, les clients sont prêts à traverser leur ville pour déguster les pâtisseries de la Maison Kayser. Rencontre avec un travailleur acharné, pétri d'ambition et d'un savant mélange de simplicité et d'audace.
Je m'abonneVous avez ouvert votre première boutique à Paris le 13 septembre 1996. Depuis, rien ne vous arrête. Vous possédez 205 boulangeries réparties dans 27 pays. Quel est votre secret de réussite ?
EK: Une infaillible persévérance et beaucoup de patience. Tout petit, déjà, je rêvais de devenir boulanger et de parcourir le monde. Après un apprentissage classique en boulangerie à 16 ans et l'obtention d'un CAP et d'un brevet de maîtrise, j'ai sillonné l'Hexagone pendant quatre ans en tant qu'apprenti chez les Compagnons du Tour de France.
L'année suivante, en 1988, j'ai rejoint l'Institut national de la boulangerie-pâtisserie, et passé dix ans à parcourir la France et le monde comme professeur de boulangerie et consultant. J'ai rencontré beaucoup de professionnels. Ça m'a construit. Les opportunités se sont présentées au fur et à mesure. La Maison Kayser a commencé son développement à l'international au Japon en 2001. Aujourd'hui, c'est le second pays d'implantation avec 34 boutiques.
Vous avez également réussi à conquérir les tables américaines?
Nous sommes présents aux États-Unis depuis 5 ans, principalement à New-York. En février, nous avons accentué notre présence Outre-atlantique avec l'ouverture de deux boutiques à Washington, dont une est située à deux blocs de la Maison Blanche. Nous sommes aussi présents en Amérique du sud avec la Colombie, le Chili et le Mexique depuis janvier.
Notre volonté est d'être présents sur presque tous les continents. L'enseigne de La Maison Kayser s'est donc répandue en Russie, en Afrique (Maroc, Sénégal et Congo), en Europe (Portugal, Belgique) et en Asie (Arabie Saoudite, Émirats Arabes Unis, Cambodge, Singapour, Hong Kong).
Comment faites-vous pour maintenir la qualité de vos produits et préserver l'image de marque de la Maison Kayser au-delà de nos frontières?
Je me repose sur des pairs de confiance. Mon métier est une passion que je souhaite partager et transmettre à d'autres artisans. Je passe beaucoup de temps à former les boulangers avec qui je noue des partenariats sous la forme de contrats en sous-licence. Certains sont formés en six mois, d'autres en deux ans.
Pour garantir le succès des boutiques à l'étranger, nous adaptons 20% de l'offre au marché local. Aux États-Unis, nous avons dû revoir l'agencement des boutiques afin de proposer plus de places assises. Les américains préfèrent consommer sur place leur café et leurs croissants aux amandes. Ils en raffolent. En Asie, nous avons imaginé un financier et un croissant au thé vert, ainsi qu'un pain de mie avec de la crème.
Vous visez de nouveaux pays en 2018?
J'aimerais exporter mon savoir-faire en Chine. On discute avec eux depuis un an. C'est une tannée, car les mentalités sont différentes. Il n'est pas toujours facile de comprendre ce qu'ils veulent ou ce qu'ils ne veulent pas. Il ne faut pas se tromper de partenaire car cela peut coûter cher.
Avez-vous d'autres ambitions ?
J'ai un autre projet qui me tient à coeur : développer, avec l'association 'Pour un sourire d'enfant', une école de formation de boulangers au Cambodge. Pays dans lequel nous possédons déjà six boutiques.
Je veille aussi à insuffler de la nouveauté. Il y a trois ans, je me suis associé avec Jean Imbert, une personne tout aussi passionnée que moi, pour créer le concept "les bols de Jean". Le restaurant propose de la gastronomie locale, et de saison servie dans un bol de pain au levain naturel toasté à l'huile d'olive, que j'ai mis au point. Trois restaurants ont déjà ouvert leurs portes à Paris.
C'est un beau projet... Avez-vous aussi connu des échecs ?
Je n'ai pas toujours choisi les bons partenaires. J'ai créé en 2002 un concept de boulangerie-épicerie avec Alain Ducasse. En 2004, j'ai décidé de mettre fin au projet. Mais je ne considère pas cette étape comme un véritable échec. Il s'agit plus d'un apprentissage. Le succès ne consiste pas à ne jamais faire d'erreurs, mais à ne pas refaire la même erreur une deuxième fois.
Comment parvenez-vous à tenir le rythme ?
Je me lève à 5 heures du matin car mes journées sont bien remplies. Je peux aussi bien endosser mon tablier pour réaliser des démonstrations en boutique, former des boulangers, ou ma tenue de chef de chantier pour régler des problèmes techniques et d'inondation de laboratoire. Pour garder la forme, je fais beaucoup de sport, du yoga, des pompes. J'adore aussi la course à pied. J'ai d'ailleurs réalisé le marathon de New York, il y a 3 ans.
Vous réussissez également à dégager du temps pour plancher sur le Pacte porté par Bruno Le Maire?
J'ai été approché par Bercy en septembre pour animer un groupe de travail et formuler des recommandations sur la conquête à l'international avec le sénateur Richard Yung. C'est une thématique très intéressante car il faut pousser les entreprises à exporter plus. Entre novembre et décembre, il y a eu beaucoup de réunions... toutes les semaines. De terrain également. Nous avons voyagé en Italie pour rencontrer les chambres consulaires et s'inspirer de leur modèle. Elles mettent à disposition des consultants qui accompagnent du démarrage à l'exportation les chefs d'entreprise. C'est assez séduisant.
Nous avons également réalisé un déplacement à Troyes avec Bruno Le Maire. Les réunions vont se poursuivre jusqu'à la présentation de la future loi au printemps 2018.
Ses adresses préférées à l'étranger
New York : Brooklin Bridge, le restaurant Bilboquet sur la 60e rue, la brasserie La Goulue dans le quartier de l'Upper East Side, le restaurant de Jean Georges, à côté de Central Park.
Hong Kong : la piscine de l'hôtel Four Seasons avec vue sur la baie, le restaurant le Caprice du Four Seasons, le restaurant Akramé.