L'apprentissage vu par les apprentis
Autonomie, indépendance financière, découverte du monde professionnel et de savoir-faire, voilà autant de raisons avancées par les apprentis pour défendre et porter haut l'apprentissage. Alors qu'une campagne nationale de promotion a été lancée, de jeunes apprentis témoignent.
Je m'abonneDe la maroquinerie à l'aménagement paysager en passant par la restauration ou l'hôtellerie, ils se sont découvert un métier, alliant un savoir-faire, une formation mais également la découverte d'un univers professionnel où tout est à construire. Ce métier est, pour beaucoup, devenu une passion et un espace d'investissement personnel qu'ils ne regrettent pas.
À l'occasion du lancement de la campagne de sensibilisation et de promotion de l'apprentissage "#DémarreTaStory", lundi 23 avril 2018 au Musée des Arts et Métiers de Paris, de nombreux apprentis étaient réunis pour valoriser cette voie que tous qualifient de filière d'excellence et moteur d'ascension sociale.
Âgés de 16 à 23 ans, Margot, Gauthier, Laurine, Justin ou Titouan ont chacun fait le choix de l'apprentissage. Un choix revendiqué alors que, bien souvent, la formation en apprentissage souffre d'idées reçues de la part des jeunes et de leur famille. Une difficulté supplémentaire pour inciter et encourager les élèves à aller voir cette voie autrement formatrice.
L'autonomie par le travail
Pour beaucoup d'entre eux, le choix d'opter pour l'apprentissage répond à une envie de travailler. C'est le cas de Gauthier, 21 ans, en première année de CAP Cordonnerie (niveau V) chez les Compagnons du Devoir qui s'est laissé tenter par cette filière après un baccalauréat général. "Je suis entré en apprentissage cordonnerie parce que je cherchais à avoir mon indépendance, être autonome, explique-t-il. Mettre un pied dans le monde du travail change complètement nos repères par rapport au monde scolaire mais ça a quelque chose de valorisant et de passionnant".
Un aspect également mis en avant par Laurine, 18 ans, en première année d'un Brevet technique des métiers (niveau IV) chocolatier-confiseur. Formée dans une chocolaterie de Bourg-en-Bresse (Rhône-Alpes), elle se montre ravie du choix fait lors de son année de troisième. "Après un stage de découverte, j'ai continué deux ans en CAP puis je me suis décidée à poursuivre avec un brevet technique. Cela m'a permis d'avoir beaucoup plus confiance en moi et dans mes capacités. L'idée d'acquérir une autonomie était forcément intéressante. C'est aussi un super moyen de s'affirmer comme femme dans un milieu encore essentiellement masculin", estime-t-elle.
Une intégration par le concret qui les séduit, d'autant plus que le monde du travail ne les effraie pas. Au point même de faire preuve d'ambition. "C'est une voie de réussite qui nous ouvre beaucoup de portes pour trouver du travail par la suite en valorisant une expérience formatrice", dit Justin, apprenti en terminale pro Cuisine (niveau V).
Forcément l'attrait financier - même s'il n'est pas toujours mis en avant - figure comme un avantage supplémentaire pour ces jeunes. "L'apprentissage, c'est aussi une autonomie qui nous est proposée avec un salaire tous les mois et des responsabilités", ajoute-t-il.
Outre la découverte d'un métier et de personnes passionnées, il faut dire que c'est aussi leur réticence à passer l'essentiel de leur vie professionnelle dans un bureau qui les a incités à se lancer. "J'ai toujours eu l'envie de travailler dans le développement durable avec un projet défini, se souvient Titouan qui après une licence d'économie-gestion à l'université s'est lancé dans un BTS d'aménagement paysager en alternance (niveau III). Je voulais vraiment être acteur de mon travail et ne pas être assis dans un bureau". Laurine estime, elle, que c'est "l'assurance d'être sans cesse active dans un métier qui lui plaisait" qui l'a séduite.
Valoriser la théorie et la pratique
L'intérêt pour ce type de formation est également mis en avant pour la complémentarité des enseignements théorique et la mise en pratique en entreprise. "À l'école, on apprend les bases avec des cours de gestion, de vente, marketing et de communication. Ce sont autant d'aspects que je peux mettre en place chez mon employeur, en plus du savoir-faire propre au métier", réagit Laurine.
Une découverte du monde l'entreprise et des problématiques qui sont autant d'atouts lorsque les jeunes travaillent dans de petites entreprises. Un moyen d'aborder plus de facettes. Pour la jeune femme, "travailler dans une petite entreprise permet de s'améliorer sur de nombreux points puisqu'on est amené à tout faire."
C'est le fait de découvrir la réalité du monde du travail qui a incité Margot, tout juste majeure, à s'engager dans l'alternance. En première année de CAP Maroquinerie chez les Compagnons du Devoir (niveau V), elle loue la valeur de cette immersion par l'apport d'un "environnement beaucoup plus concret". Même sentiment pour Titouan qui pointe la complémentarité entre la théorie et la pratique. "On a l'impression de progresser plus vite, de mieux valoriser la théorie". Un élément indispensable qui fait figure de force dans leur choix.
D'autant que c'est par le biais de leurs maîtres d'apprentissage que ces apprentis disposent d'un regard bienveillant sur leur formation. "J'ai eu très vite une grande liberté d'action de mon employeur, dit Laurine. Il me transmet son amour du métier tous les jours. Ça me permet d'avancer rapidement et de m'améliorer. Il a vu que j'étais passionné et investie. La relation de confiance qui s'est créée est formatrice et me fait grandir".
De son côté, Titouan reconnaît que tout n'a pas été facile au départ. Il lui a en effet fallu convaincre et prouver sa détermination auprès de ses maîtres d'apprentissage. "L'intégration a été compliquée au début puisque je suis arrivé sans avoir fait un bac pro comme c'était le cas pour mes collègues de filières. J'ai mis un peu de temps à avoir la confiance de mes employeurs". Aujourd'hui, tout va mieux pour le jeune apprenti paysagiste. "Même si j'ai galéré au départ, ils se rendent compte que je suis plus motivé que les autres. Mon parcours différent est aussi une force".
Confiance en soi
Pourtant, l'entrée sur le marché du travail, les préjugés sur la formation et les découragements potentiels à choisir la voie de l'apprentissage n'ont pour eux, pas lieu d'être. Tout au plus, partagent-ils une légère inquiétude vécue au départ. "Oui ça peut faire peur de s'orienter et d'affronter un milieu différent, qui nous est inconnu, dit Justin. Mais il ne faut pas être effrayé, il faut parfois faire preuve d'audace".
Une expérience "intense" pour Laurine qui conseille d'être motivé et d'avoir le tempérament pour réussir. "Il faut du caractère et de l'envie. Mon but est d'être en haut de classement, de m'ouvrir de nouvelles opportunités professionnelles et partir à l'étranger".
Pour rassurer ceux qui hésiteraient encore, tous défendent le droit à essayer et surtout à l'erreur. "On a le droit de se tromper mais le plus important selon moi c'est de croire en soi, de foncer, de ne surtout pas hésiter. Personne ne le regrettera ", dit Gauthier.
Encourager et défendre un système qui fait ses preuves, c'est le message de Margot. "Je ne peux qu'encourager les jeunes qui hésitent à se lancer. On peut commencer par un stage et se lancer par la suite", note-t-elle. Et Titouan, de conclure : "L'apprentissage m'a appris deux valeurs : la rigueur et l'abnégation".