Vous broyez du noir: que faire?
Soutenir les chefs d'entreprise en difficulté, les aider à rompre leur solitude et à s'en sortir... sous l'impulsion de psychologues et d'associations. Des initiatives prometteuses émergent en France pour apporter aux dirigeants un véritable soutien moral.
Je m'abonneGuy Castel a vécu l'enfer en 2013. Sa TPE, spécialisée dans la chaudronnerie industrielle ne parvient à retrouver une dynamique malgré un déménagement dans le Languedoc-Roussillon pour trouver de nouveaux clients. Après plusieurs mois d'inactivité -le business de l'entreprise se concentrant uniquement entre février et septembre-, la trésorerie se retrouve à sec en fin d'année. Des problèmes d'argent qu'il a gardés pour lui, par honte ou tout simplement par crainte. Peur de perdre ses clients ou ses fournisseurs. Ou tout simplement de décevoir ses proches.
Guy Castel tourne en rond, perd en discernement et en confiance en soi. Il décide tout de même, en 2014, de se rapprocher de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) dont il dépend pour engager une procédure de sauvegarde. La CCI l'invite à se tourner vers un centre d'information sur les préventions des difficultés des entreprises (CIP). Un plan de dettes est établi, les carnets de commandes analysés. Puis la décision tombe... comme une bénédiction. "Le CIP me confie qu'un plan de sauvegarde n'est pas nécessaire. Les professionnels m'ont fait connaître un architecte d'intérieur pour remplir mon carnet de commandes en saison creuse, de septembre à décembre", confie Guy Castel.
Si aujourd'hui ce dirigeant s'en est sorti, il insiste sur la "nécessité de se faire accompagner". Ces rendez-vous réguliers lui ont apporté un véritable soutien moral. "Neuf personnes sur dix qui se suicident ne sont pas malade mais en souffrance. Cinq ou six consultations suffisent pour arrêter un processus de crise. Et parfois même, pour relever la tête, il suffit de se sentir important pour deux ou trois personnes", relève Jean-Luc Douillard, psychologue clinicien.
Vers qui se tourner ?
Pour prévenir la détresse psychologique d'un dirigeant, il existe d'autres structures que les CIP, dont les entretiens gratuits et confidentiels sont conduits collégialement par des professionnels bénévoles : expert-comptable, commissaire au compte, avocat, juge du tribunal du commerce qui n'est plus en activité, conseiller technique de la CCI ou de la CMA.
- Les tribunaux de commerce
Atténuer le désespoir d'un dirigeant dont la boîte vient de couler, prévenir les envies de suicide ou les cas de burn-out... c'est l'objectif que se fixent désormais de nombreux tribunaux de commerce grâce au dispositif Apesa (Aide Psychologique aux Entrepreneurs en Souffrance Aigüe). "Ce projet propose de munir les professionnels du Tribunal de Commerce d'un outil de repérage des signes de souffrance aigüe chez les chefs d'entreprise en situation de liquidation ou de redressement judiciaire. Ils sont les mieux placés pour apprécier l'état d'esprit d'un dirigeant en difficulté", détaille Jean-Luc Douillard, à l'origine du dispositif Apesa à Saintes (Charente-Maritime).
Si les membres des tribunaux de commerce constatent les signes d'une détresse psychologique, ils établissent une fiche d'alerte, avec l'accord du dirigeant. Ce document est transmis au référent psychologue départemental. Un entretien téléphonique est organisé dans les 24 heures. Suite à ce premier contact, le chef d'entreprise est orienté, si besoin, vers le psychologue adhérent au réseau le plus proche de chez lui, pour un suivi pouvant aller jusqu'à cinq séances. Cette démarche est entièrement gratuite.
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- Le réseau ECTI
Cette association, constituée de séniors bénévoles, d'anciens cadres et de dirigeants à la retraite, accompagne et conseille les entrepreneurs en activité à surmonter une difficulté ou développer leur activité. Ce réseau compte 2000 adhérents, présents dans 83 délégations départementales.
- La fondation entrepreneurs en détresse
Sa principale mission : prévenir l'exclusion des dirigeants des PME et les aider à trouver des solutions pour sortir la tête de l'eau. L'association dispose d'experts bénévoles, d'un numéro de téléphone confidentiel disponible 24h/24 (06 15 24 19 77), d'un entretien de première urgence dans les 5 heures suivant le premier contact.