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Digital : les commerçants de proximité connaissent mal les attentes de leurs clients

Publié par Amélie Moynot le | Mis à jour le

A travers un baromètre sur le web-to-store, BVA et Mappy se sont penchés sur les pratiques des commerçants de proximité en matière de digital. Bilan : un certain dynamisme, mais des décalages entre ce qu'ils pensent ou proposent, et ce qu'attendent leurs clients... État des lieux.

Plus de la moitié (55 %) des commerçants de proximité possèdent (ou souhaitent posséder) un site Web et 53 %, une page Facebook. C'est du moins ce que fait apparaître un baromètre de l'institut BVA et de Mappy, fournisseur de services de cartographie et de recherche géolocalisée de produit, sur le web-to-store, dévoilé en novembre 2016. "Un mouvement à la hausse par rapport à 2015, vraisemblablement dynamisé par l'idée qu' "il faut y aller"",explique les concepteurs de l'étude.

A cela s'ajoute que les sites Web des gérants de commerce disposent de fonctionnalités variées comme comme des promotions et offres spéciales (pour 45 %), des listes de marques, produits ou services (44%) ou encore des actualités (41 %).

"L'image que l'on pourrait avoir d'un site plaquette, pas mis à jour, est ici mise en défaut, analyse Florence Leveel, directrice marketing et communication de Mappy. Les commerçants prennent la mesure de l'importance des outils digitaux et du fait que c'est là que se jouent la bataille avec leurs concurrents, alors ils y vont".

Le e-commerce, ni opportunité, ni menace

Si les commerçants sont volontaires, ils émettent des doutes sur leur capacité à générer un ROI grâce à ce canal. "Pour eux, le e-commerce n'est ni une opportunité, ni une menace", observe Erwan Lestrohan, directeur d'études au sein du département Opinion de BVA. Si 35 % le voient comme un danger, ils ne sont que 37 % à le considérer comme une opportunité de doper leur chiffre d'affaires. "La capacité de créer de la croissance via le e-commerce n'est pas du tout saisie par les commerçants de proximité", estime l'expert.

Certains se tiennent encore à l'écart du mouvement. "Il y a une population qui a pris le tournant du digital (mise en ligne catalogue, mise en place de fonctionnalités transactionnelles sur leur site...) et une autre qui n'a pas encore pris la mesure ou n'a pas mis les moyens de le faire", constate Florence Leveel, qui parle de "bilan mitigé", d'autant que "cette hétérogénéité va sans doute aller grandissant".

Autre facteur de fragilité, les commerçants auraient, selon l'étude, du mal à identifier leurs principaux concurrents. Ils craignent surtout les sites ou applications spécialisés dans la vente sur Internet et les comparateurs de prix, alors même que, par exemple, moins d'un internaute sur trois passe par les comparateurs. "On s'interroge sur la façon dont ils ont pris la mesure de qui étaient leurs véritables concurrents", explique Florence Leveel.

Décalages de perception

Mais le plus problématique mis au jour par l'étude réside dans les différences de perception entre ce que pensent les commerçants et ce que souhaitent leurs clients vis-à-vis du canal Web. Ces derniers, lorsqu'ils se déplacent en point de vente, viennent à 90 % pour le produit : pour pouvoir le voir (64 %), l'essayer (52 %). Ils plébiscitent ensuite, à 74 %, la praticité (le fait de ne pas payer de frais d'envoi, la proximité) et, à 39 %, le relationnel.

Problème : "le relationnel arrive en troisième position, or c'est une force que pensent avoir les commerçants de proximité", affirme Erwan Lestrohan. "Les commerçants confondent la raison pour laquelle les consommateurs viennent les voir et leur avantage compétitif. Or cet avantage ne vaut que s'ils ont déjà réussi à attirer les clients dans les magasins...", alerte Florence Leveel.

Autre décalage, les commerçants de proximité ne sont que 14 % à penser que le Web-to-store est le parcours le plus fréquent pour leurs clients. Or plus de neuf consommateurs sur dix ayant acheté un produit chez eux ont commencé par rechercher des informations sur Internet. Le même décalage existe au niveau des avis client, importants aux yeux de 72 % des commerçants mais de 43 % des clients seulement.

Le mobile et le click-and-collect, insuffisamment exploités

L'étude dresse aussi un état des lieux des pratiques des commerçants de proximité en matière de mobile. Les consommateurs l'utilisent en premier lieu, à 63 %, pour vérifier les horaires d'ouverture d'un point de vente. Mais beaucoup plus rarement en commerce de proximité. Du côté des professionnels, "l'écosystème du portable n'est pas intégré dans le parcours client chez les commerçants de proximité", note Erwan Lestrohan.

Par ailleurs, si le click-and-collect se généralise, l'étude révèle, là encore, un décalage de perception entre les professionnels et les utilisateurs. Ce mode de consommation, combinant achat en ligne et retrait en magasin, intéresse 16 % des commerçants... et 88 % des consommateurs. Dans les faits, il bénéficie moins aux commerçants de proximité qu'aux grandes enseignes : les clients se disent prêts à 55 % à utiliser ou réutiliser ce service dans le premier cas, à 74 % dans le second.

"Les clients apprécient l'effort des commerçants mais ils trouvent probablement que l'expérience client n'a pas été assez satisfaisante. Il y a un problème de qualité sur lequel les commerçants devront probablement travailler à l'avenir", relate Florence Leveel.

Enfin, les commerçants sont encore minoritaires à pratiquer l'envoi de promotions par mail ou SMS. 46 % des clients en ont déjà reçu de leur part, ce qui les a incités, à 72 %, à se déplacer en point de vente. "Une pratique peut-être sous-exploitée par les commerçants de proximité, soit parce que c'est chronophage, soit parce qu'ils ne sont pas conscients que c'est un vecteur de croissance", estime Erwan Lestrohan. Une piste supplémentaire à exploiter pour développer son potentiel digital.