Taxe professionnelle: une réforme en demi-teinte
Annoncée depuis deux ans, la réforme n'a pas été à la hauteur des attentes des dirigeants, qui souhaitaient un réaménagement en profondeur. Trois axes apportent toutefois des nouveautés intéressantes.
Je m'abonneLes aménagements issus de la loi de finances pour 2006 ont été présentés comme une première étape. La réforme de la taxe professionnelle sera donc poursuivie. Premier constat: les bases d'imposition n'ont pas subi les changements espérés par les dirigeants. Toutefois, les adaptations apportées ont permis à certaines entreprises de bénéficier d'une réduction du montant de leur taxe: soit à travers le plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, soit grâce au dégrèvement pour investissements nouveaux. En outre, le législateur a procédé au renforcement du dégrèvement de taxe, octroyé aux entreprises qui disposent de certains véhicules pour les besoins de leur activité. Explications.
Tout d'abord, les chefs d'entreprise, redevables de la taxe professionnelle, peuvent demander, chaque année, le plafonnement de ce montant. Et ce, en fonction d'un pourcentage de la valeur ajoutée produite au cours de l'année d'imposition. Ce mécanisme limite son montant. Il s'effectue au moyen d'une demande de dégrèvement à déposer avant le 31 décembre de l'année suivant l'imposition, auprès de votre service des impôts.
A savoir
Des atouts et des bémols
Les modifications apportées par le législateur au mécanisme de la taxe professionnelle sont significatives et correspondent à une première étape dans la mise en oeuvre de la réforme annoncée.
Mais la majoration éventuelle du prix de revient des immobilisations, issue de l'application des nouvelles règles comptables, va avoir pour effet de majorer aussi les bases de la taxe professionnelle dans certains cas. En effet, les nouvelles règles comptables peuvent conduire à inclure les frais d'acquisition dans le prix de revient des immobilisations, et donc entraîner une hausse des bases servant à calculer l'imposition de la taxe professionnelle. Aucune neutralité fiscale n'est prévue à ce jour: la neutralité fiscale étant un mécanisme de correction qui permet de neutraliser les conséquences négatives d'une hausse des bases imposables. N'hésitez pas a contacter votre expert-comptable pour un diagnostic personnalisé.
UN MONTANT PLAFONNE EN FONCTION DE LA VALEUR AJOUTEE
Jusque-là, le pourcentage de valeur ajoutée à prendre en compte pour calculer le montant du dégrèvement était fonction du chiffre d'affaires de l'entreprise. Il était compris entre 3,5 % et 4 % selon les cas. Par ailleurs, le dégrèvement octroyé était calculé en comparant le pourcentage de valeur ajoutée précédemment défini au montant d'une cotisation de référence. Aussi, le montant du dégrèvement était indirectement limité et n'était pas déterminé à partir de la cotisation effectivement réclamée.
La loi de finances pour 2006 a aménagé ce dispositif. En prévoyant, d'une part, que le pourcentage de la valeur ajoutée à prendre en compte, serait désormais fixé à 3,5 %. Et ce, quel que soit le montant du chiffre d'affaires de l'entreprise. D'autre part, en instaurant que le montant de la cotisation à prendre en compte, pour le calcul du plafonnement, doit correspondre au montant de la cotisation effective réclamée à l'entreprise. L'effet bénéfique est réel: jusqu'à présent, le montant des cotisations susceptible d'être plafonné pouvait être différent du montant de taxe professionnelle effectivement porté à la charge de l'entreprise. Ainsi, le montant du plafonnement va être déterminé de manière uniforme, pour toutes les entreprises, en prenant en compte la cotisation réellement due par l'entreprise. Seul regret, ce nouveau dispositif, favorable aux sociétés, ne s'appliquera qu'aux impositions établies à compter de l'année 2007.
Deuxième domaine bénéficiant d'améliorations: les nouveaux investissements. La loi du 9 août 2004 avait institué un dégrèvement temporaire pour les investissements réalisés par les entreprises entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2005. Cela leur permettait de déduire pendant deux ans, du montant de la taxe professionnelle à payer, la fraction de l'impôt générée par ces nouveaux investissements. Il convient de rappeler que la base d'imposition de la taxe professionnelle comprend la valeur locative des immobilisations corporelles dont un redevable dispose pour les besoins de son activité professionnelle. Tout nouvel investissement peut donc conduire à une hausse de la base imposable.
DEGREVEMENT POUR TOUS LES INVESTISSEMENTS NOUVEAUX
La loi de finances pour 2006 a pérennisé cette mesure, tout en l'améliorant. Le nouveau dispositif s'applique pour tous les investissements réalisés à compter du 1er janvier 2006, et portant sur des immobilisations corporelles neuves, pouvant être soumises à l'amortissement dégressif (la liste de celles éligibles à l'amortissement dégressif est fixée par la loi, et consultable sur www.impots.gouv.fr). Le montant du dégrèvement sera égal à la valeur locative nette des biens concernés, multiplié par le taux global de l'année ou le taux de l'année 2003 s'il est inférieur; et majoré des frais de gestion de la fiscalité locale.
Désormais, le dégrèvement va s'appliquer de façon dégressive: 100 % au titre de la première année d'application; 2/3 au titre de la deuxième année; puis 1/3 au titre de la troisième année. Ce n'est donc qu'à compter de la quatrième année que l'investissement générera, dans l'intégralité de son montant, un supplément de taxe professionnelle.
Afin d'en bénéficier, les contribuables doivent indiquer sur la déclaration N°1003, à produire avant le 1er mai de chaque année (délai reporté au 31 mai en 2006), la valeur locative des biens en question. Pour les contribuables non astreints à la production d'une déclaration N°1003 (posez la question à votre expert- comptable en cas de doute), ces informations doivent être fournies sur papier libre.
DEGREVEMENT EN FAVEUR DE CERTAINS VEHICULES
La loi prévoit enfin, en faveur des entreprises qui utilisent certains véhicules, un dégrèvement par engin motorisé. Cette mesure concerne notamment les véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises et dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 7,5 tonnes. Le montant a été majoré dès la loi de finances rectificative pour 2005, mais cette majoration va s'appliquer pour les impositions établies à compter du 1er janvier 2005.
Il appartient donc aux entreprises, qui sont en droit de bénéficier de ce bonus, d'en faire la demande avant le 31 décembre 2006. Et ce, même si vous avez déjà imputé le dégrèvement attendu sur le solde de la taxe professionnelle, due au titre de 2005 et que vous avez réglé au plus tard le 15 décembre 2005. En effet, les entreprises n'étaient pas encore informées de ce nouveau montant lorsqu'elles ont acquitté le solde de leur taxe professionnelle à cette date.
@ DR
André-Paul Bahuon est président de l'Ordre des experts- comptables Paris Ile-de-France, institution régionale de l'Ordre des experts-comptables, conseil supérieur qui dépend du ministère de l'Economie et des Finances. Outre ses fonctions traditionnelles de contrôle de l'exercice de la profession comptable libérale et de représentation, l'Ordre Paris Ile-de-France est au service des 700 000 entreprises franciliennes. Il constitue une ressource de conseils indispensable à l'ensemble des 3 900 cabinets d'expertise- comptable, 5 500 experts- comptables, et 1 700 stagiaires experts-comptables de la région Paris Ile-de-France. André-Paul Bahuon est également président fondateur du cabinet Creatis.
Le montant de ce dégrèvement est fixé à 366 euros pour les camions dont le poids total autorisé en charge est compris entre 7,5 et 1 6 tonnes Le montant est en revanche porté à 700 euros pour les camions dont le poids total autorisé en charge est supérieur ou égal à 1 6 tonnes. A noter qu'il est fixé à 1 000 euros pour ces mêmes véhicules, dès lors qu'ils répondent aux normes environnementales (normes Euro II ou supérieures).