Le «made in région»: feu de paille ou véritable tendance?
De nombreux commerces se positionnent sur le créneau de la vente de produits locaux par conviction, mais aussi pour satisfaire un nombre croissant de consommateurs, à la recherche de qualité et d'authenticité. Mais ce concept est-il pérenne? Revue de détail.
Je m'abonneIls sont nombreux à partir sur les traces du chou de Pontoise, des fromages de Brie ou encore des savons à la violette de Toulouse. Des produits du terroir, cultivés, récoltés et préparés - quasiment - sur place. De plus en plus de commerces se positionnent sur ce créneau, à l'image de l'Echoppée locale. Cette épicerie, implantée dans la capitale, est un lien direct entre le consommateur urbain et une quarantaine de producteurs exclusivement franciliens. Un retour aux sources qui régale le consommateur.
Les raisons de cet engouement? D'un côté, l'achat plaisir, avec un client qui se tourne vers les produits régionaux pour leur fraîcheur et leur qualité. De l'autre, le client «locavore», plus engagé, prônant une consommation responsable et soucieux de faire appel à des producteurs proches de chez lui, limitant ainsi son empreinte carbone. « Aujourd'hui, 30 % des Français souhaitent consommer moins, mais mieux. Ils acceptent de payer plus cher pour des produits de qualité », explique Philippe Moati, économiste et cofondateur de l'Obsoco (Observatoire société et consommation).
Une tendance confirmée par l'étude sur les produits alimentaires régionaux publiée par Xerfi en octobre 2012, pour qui la crise économique réussit aux produits locaux.
« Le climat anxiogène pousse en effet les consommateurs à adopter des réflexes de repli sur eux-mêmes, qui se traduisent par une appétence pour les produits locaux et régionaux », détaille l'étude.
Un marché éphémère?
Les produits locavores ont le vent en poupe, mais jusqu'à quand? « Ce mouvement pourrait s'essouffler d'ici à 15 ans. Il risque de souffrir de la baisse des dépenses alimentaires des jeunes générations, moins engagées », commente Philippe Moati. D'autant que depuis quelques années, la grande distribution (Système U, Leclerc, etc.) s'invite dans la partie. Une concurrence qui va obliger les commerces de proximité à adopter une stratégie de différenciation. « Les commerçants doivent s'approvisionner auprès de petits producteurs et raconter une histoire autour de ces produits. Une démarche qui ne va pas de soi pour la grande distribution, qui a besoin de volume. Le commerçant peut ainsi se prévaloir de faire vivre le tissu économique local », avance Philippe Moati.
C'est donc en adaptant leur positionnement que les commerces dédiés aux produits locaux vont pouvoir perdurer. C'est d'ailleurs ce qu'a parfaitement compris Arpin, une enseigne d'habillement et de décoration basée en Savoie. Sa marque de fabrique? Ne vendre que des produits (draps, coussins, vestes, pantalons) fabriqués à l'aide de laine de moutons des alpages de sa région. « Si nous avons enregistré une baisse d'activité dans les années quatre-vingt-dix, nous assistons depuis 2003 à un retour vers les matières premières, nobles et authentiques. Les clients sont très sensibles à notre démarche. Notre activité croît de 15 % par an depuis une dizaine d'années », se targue Jean-Philippe Caille, gérant de l'enseigne, qui dispose de trois boutiques et réalise un chiffre d'affaires de deux millions d'euros. Le positionnement marketing «art de vivre à la montagne» de cette entreprise de 15 salariés rayonne sur la scène locale, mais également nationale, voire internationale. Pour faire face à l'afflux des demandes (Italiens, Autrichiens, Suisses...), le gérant a ouvert, en octobre dernier, un site marchand.
Le «made in région», un argument de poids pour les structures de petite taille! A condition d'adopter la bonne stratégie.