5 conseils pour évaluer une entreprise
L'estimation de la valeur d'une entreprise ne se réduit pas à la situation nette comptable ou à son chiffre d'affaires. Pour l'acquéreur, il convient d'examiner la situation de la structure à la loupe
Je m'abonneUne entreprise, même très petite, est tellement multifacettes qu'il est difficile d'en cerner tous les aspects lors d'un processus de rachat. L'acquéreur, s'il ne souhaite pas découvrir de «cadavres dans les placards», a donc intérêt à entreprendre un audit d'acquisition poussé et à demander les garanties les plus larges possibles au vendeur (garantie de passif, engagement de non-concurrence, etc.). Celui-ci doit lui permettre de se forger une opinion sur la valeur de l'entreprise, ses forces et ses faiblesses. Il doit porter sur les aspects juridique (engagements, contrats, patrimoine), financier (rentabilité, clientèle, délais de paiement, solvabilité, encours), social (personnel, contrats de travail et risques), fiscal (déclarations, risques) et organisationnel. Cet audit est généralement réalisé par un expert-comptable et un avocat dont le coût varie selon la taille et la complexité de l'entreprise. Il est d'ailleurs fréquent que la promesse de cession comporte des clauses suspensives relatives à l'audit d'acquisition, car acheter une entreprise sans bien la connaître peut générer des désillusions importantes et avoir des conséquences graves.
1 Cerner les compétences-clés
La pérennité d'une TPE repose souvent sur son chef d'entreprise et sur quelques salariés. L'appréciation de l'équipe entourant le cédant doit donc être précise. Leurs compétences, leur ancienneté, leur degré d'implication, leur lien avec le dirigeant, voire avec d'autres collaborateurs, les clients ou fournisseurs sont à étudier de près. Une des étapes fondamentales de l'étude d'acquisition consiste donc à détecter ces collaborateurs-clés et à savoir s'ils sont prêts à rester dans l'entreprise. Si c'est le cas, il convient d'étudier les conditions de validation de ce choix. Dans le cas contraire, il est impératif de voir s'il est possible de conserver les compétences. En effet, si la valeur de l'entreprise repose sur ces collaborateurs-clés, l'acquéreur risque d'acheter une entreprise riche de son passé, mais sans avenir...
2 Définir la rentabilité de l'entreprise
La rentabilité d une entreprise se mesure en comparant son résultat net à son chiffre d'affaires ou aux capitaux investis. La formation du résultat net doit donc être analysée avec la plus grande vigilance car il peut être différent en fonction du mode de rémunération du dirigeant et de la forme juridique de l'entreprise. Si le chef d'entreprise ne se rémunère qu'avec un faible salaire, préférant bénéficier des dividendes, le résultat net n'en est pas affecté. A contrario, si l'entreprise est exploitée sous forme individuelle, le dirigeant ne bénéficie pas de rémunération proprement dite. Celle-ci est incluse dans le bénéfice affiché qu'il faut donc analyser différemment en dissociant la rémunération théorique, liée au travail, du bénéfice réel. Dans tous les cas, il convient de définir le niveau réel de rentabilité en réintégrant un niveau de rémunération normale du dirigeant. D'autres éléments sont à examiner, notamment les avantages en nature.
3 Etablir la dépendance vis-à-vis des tiers
Pour être certain que la pérennité de l'entreprise n'est pas fragilisée par une grande dépendance à l'égard de tiers, il est nécessaire de mesurer le poids des principaux clients dans le chiffre d'affaires et celui des fournisseurs dans les achats. Par ailleurs, la connaissance de la santé financière et des perspectives économiques de ces interlocuteurs permettent d'apprécier l'avenir.
Le risque d'un petit nombre de clients et/ou de fournisseurs accroît celui de dépendance et impacte la marge potentielle de l'entreprise. Cependant, le fait, par exemple, de représenter chez les clients un fournisseur majeur réduit cette fragilité. C'est pourquoi l'appréciation doit se faire dans les deux sens.
4 Déceler les passifs cachés
Dangereux pour l'acquéreur, les passifs cachés sont des dettes non inscrites au bilan de l'entreprise mais que le repreneur doit honorer. Ce risque peut venir de l'Etat, si les règles fiscales n'ont pas été correctement appliquées (sous-évaluation de stocks, provisions injustifiées, erreurs formelles quant aux déclarations, justifications des charges engagées dans l'intérêt de l'entreprise, retards de déclarations...). Il peut aussi provenir des organismes sociaux si les rémunérations n'ont pas été . correctement soumises aux cotisations sociales (en cas de sous-évaluation des avantages en nature, de remboursements forfaitaires de frais, d'erreurs sur les déclarations). Les salariés représentent, eux aussi, un danger si des litiges prud'homaux naissent ou sont en cours, de même que certains clients ou fournisseurs en cas de litiges commerciaux tels que des livraisons en retard, des contrats non respectés. Sans oublier les pouvoirs publics, en cas de non-respect des normes environnementales (liés à une pollution ou à des nuisances). L'audit d'acquisition doit ainsi balayer nombre d'aspects de la vie de l'entreprise pour appréhender ce risque, tout passif détecté réduisant la valeur de l'entreprise.
5 Examiner le marché d'intervention
D'autres considérations ont un poids sur la valorisation de l'entreprise, notamment les perspectives économiques du secteur d'activité, selon qu'elles envisagent une croissance ou une régression. Il est également nécessaire de prendre connaissance des atouts spécifiques de l'entreprise (comme son savoir-faire, son emplacement, sa notoriété, sa qualité de service...), notamment vis-à-vis de sa concurrence. Enfin, il est essentiel de valider le degré de coopération que le cédant s'engage à apporter pour réussir la transmission de l'entreprise.
Expertise & Conseil est un cabinet d'expertise comptable et d'audit, installée Paris depuis 1978. Ses équipes ont vocation à accompagner le dirigeant d'entreprise et à le conseiller dans la création, le pilotage et la transmission de son entreprise, en visant la maîtrise des risques et une information adaptées à sa stratégie. Sylvie Vercleyen et Jean-Luc Scemama sont experts comptables.
Enfin, si l'évaluation d'une entreprise prend en compte des éléments du passé et du présent, l'acquéreur parie, lui, sur l'avenir. Ce sont, en effet, ces perspectives d'avenir et de rentabilité qui sont achetées. Il convient donc, au-delà de l'audit d'acquisition, d'avoir une approche prévisionnelle, au moins à deux ou trois ans.