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[Tribune] 4 règles à connaître avant d'entreprendre dans la "food"

Publié par Alexandre Stern, Operating Partner chez I&S Adviser le | Mis à jour le

D'un abord a priori facile, entreprendre dans le secteur alimentaire est beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît. Retour sur quelques enseignements tirés de l'expérience d'Alexandre Stern, créateur de la maison éponyme spécialisée dans le miel.

Le marché de la "food" suscite de nombreux projets d'entreprise. Selon les chiffres 2019 qui circulent, il compterait entre 300 à 500 start-up foodtech. Force est d'admettre qu'il offre un potentiel de développement très attractif pour tout entrepreneur et investisseur, à la hauteur des montants des levées de fonds telles celles d'Agricool, Alkemics, Innovafed, Feed, Frichti, Phenix, Wynd, Lunchr, Brigad, Taster ou Chefing.

Ayant atteint la maturité sur certaines activités comme les livraisons de repas, il intéresse aussi les grandes entreprises qui n'hésitent pas à racheter des pépites comme FoodCheri par Sodhexo, Quitoque par Carrefour, Cookangels par Norac - quand ce ne sont pas des mouvements de concentration entre start-up à l'image du rachat de 6 jeunes pousses par Foodette en avril dernier.

Une condition toutefois pour réussir : il faut comprendre et s'approprier les règles qui sont spécifiques à ce marché. Un point sur lequel rien ne vaut le retour terrain d'entrepreneurs qui ont vécu et déjà géré des activités similaires. De ma propre expérience, je retiendrais 4 " règles ".

Règle n°1 : se lancer seulement si on est passionné par l'alimentation et soucieux des consommateurs

Se lancer sur le marché de la Food demande d'avoir un intérêt prononcé pour l'alimentation en général, et le goût en particulier. La clé de la réussite est en effet d'être sincèrement convaincu que l'on peut changer la façon dont le monde s'alimente, que l'on va apporter aux consommateurs de nouveaux produits dont ils ne pourront plus se passer, qu'ils sont prêts à les consommer autrement.

L'expérience consommateur doit être au coeur des propositions de valeur des start-up et PME de la food, soutenu par un intérêt personnel fort.

Règle n°2 : trouver le bon business model, ne pas hésiter à innover

Les idées de nouveaux aliments, ingrédients ou services fourmillent, portées par la quête d'une alimentation plus saine, goûteuse et qui a du sens, tout en tenant compte des nouveaux modes de consommation et de ce que les technologies numériques et biotechnologies rendent désormais possible.

Pour que ces idées deviennent des entreprises viables qui se développent à moyen et long terme, il faudra non seulement valider leurs marchés cibles, mais aussi imaginer les business models qui vont avec et qui garantiront la rentabilité. C'est par exemple ce qu'a su faire la start-up Ynsect, qui commercialise des farines d'insectes à destination de l'alimentation animale.

Règle n°3 : bien calibrer ses besoins en financement pour assurer son développement

Les activités du secteur alimentaire peuvent être plus ou moins intensives en capital. Si ouvrir une activité de restauration permettra le plus souvent l'accès aux prêts bancaires et pourra ensuite être développée en franchise (moins gourmande en capitaux), la plupart des projets innovants demande un investissement de départ important. Sur certains secteurs comme la livraison de repas à domicile, l'acquisition de clients nécessite notamment un gros effort financier sur un marché où la concurrence est rude et les marges étroites.

Il est donc essentiel de prévoir dès le début les bons financements, qu'il s'agisse de capitaux de proximité, de business angels ou de fonds d'investissement spécialisés comme French Food Capital.

Règle n°4 : ne jamais oublier le contexte réglementaire

Au fil des scandales sanitaires et de l'évolution de nos connaissances (cf. nanotechnologies), la réglementation se durcit. Déjà très exigeante, elle intègre régulièrement des mises à jour liées aux dernières découvertes scientifiques et sanitaires sur la nutrition. La directive européenne Novel Food adoptée en 2017 fixe par exemple les règles en matière de mise sur le marché de nouveaux ingrédients et aliments.

La réglementation pourrait aussi être prochainement impactée par des décisions relatives à la préservation de l'environnement : modification des conditions de production du fait du réchauffement climatique, tant pour les végétaux que pour les animaux ; risque pesant sur les approvisionnements en eau qui demandera de revoir les modes de production ; évolution des législations sur les emballages plastiques ; etc.

Autant d'éléments à suivre de près.

Comme pour toute activité entrepreneuriale, se lancer dans la food, aussi 'trendy' semble-t-il être, n'est pas un long fleuve tranquille. Le succès est néanmoins à portée de main de tout entrepreneur qui a un intérêt sincère pour ces sujets et qui osera s'appuyer sur les retours terrain de ses pairs, à la fois pour cerner les subtilités de " ce qui marche " contre " ne marche pas ", comprendre la réglementation, innover, trouver les bons financements et accélérer en temps voulu la croissance de son activité.

Pour en savoir plus

Alexandre Stern, serial entrepreneur (Cryptolog, reprise de la société Lovendalmasaï, Maison Alexandre Stern), est désormais operating partner chez I&S Adviser