[Étude de cas] Un restaurant qui partage son frigo
Publié par Mallory Lalanne le | Mis à jour le
Construire par des gestes quotidiens une société plus humaine et solidaire. C'est le projet que mènent de front Dounia et Malika Mebtoul, co-gérantes du restaurant parisien La cantine du 18. Elles ont été les premières à accueillir le frigo solidaire.
L'apparence chic de la Cantine du 18 est délusoire. Le mobilier, les chaises, les tables de ce restaurant parisien ont été chinés dans des brocantes et des écoles. Cet esprit récup et économie circulaire, Dounia et Malika Mebtoul, les gérantes, l'ont dans la peau. Elles ont été les premières restauratrices à installer un frigo solidaire en libre-service. C'était en juin 2017. "Il y a trop de gaspillage, trop de gens en précarité. Le frigo solidaire est une évidence", reconnaît Dounia Mebtoul.
Cette jeune restauratrice, titulaire d'un Bachelor d'une école de commerce parisienne, a découvert le concept à Londres en 2011. " L'année dernière, je suis tombée sur un article qui mettait en lumière un autre exemple de frigo solidaire à Berlin. Je me suis donc renseignée pour mettre en place ce concept ", poursuit Dounia Mebtoul, qui propose une cuisine de maison avec des produits frais et travaille principalement en circuit court avec les commerçants du quartier. Peu de semaines après, les premiers restaurateurs et commerçants du quartier viennent déposer leurs invendus et leurs plats. Les particuliers donnent leurs végétaux et fruits secs. Un carnet précise les dates de péremption des plats déposés. La commerçante recense 40 déposants pour 60 bénéficiaires. Ce sont des familles nombreuses, des smicards, des étudiants, des personnes isolées ou des retraités aux faibles revenus.
Des abus ? Dounia Mebtoul n'en constate pas. "Il suffit de discuter avec les personnes pour se rendre compte qu'elles sont dans le besoin, car ça ne se voit pas au premier abord", avoue-t-elle Pour déployer à plus grande échelle cette initiative et indiquer la marche à suivre aux professionnels, les commerçantes ont mis en place en décembre 2017 une grande campagne de sensibilisation avec l'association Identité Mutuelle. En moins de six mois, 19 frigos solidaires ont été créés en France.
Une première victoire qui ne freine pas pour autant les ardeurs de Dounia et Malika Mebtoul. Le couple mère-fille souhaite aller plus loin dans sa démarche. "Nous disposons d'un grand espace de 200 m2, donc autant l'occuper, et créer encore plus de lien !", s'amuse la fille. Le 22 décembre, elles ont organisé avec l'association Solidarité Nomade un repas de noël solidaire à destination des familles de l'association et des bénéficiaires du frigo solidaire.
Des braderies solidaires
La Cantine 18 est par ailleurs à l'origine des Charity Shop avec l'association Utopia 56 qui oeuvre en faveur des migrants. Le concept? Une fois par mois, une braderie de vêtements, qui proviennent des dons faits par les Parisiens, est organisée pour recueillir de l'argent et offrir des vêtements pour les migrants, de la nourriture et financer des nuits d'hôtel. "L'association récolte en moyenne entre 1000 et 1200 euros par événement", commente Dounia Mebtoul.
Des valeurs et une éthique qui font recette. 80% de la clientèle de la Cantine est fidèle. "Ce sont des clients qui nous ressemblent. Ils nous soufflent de nouvelles idées, nous poussent à aller plus loin dans notre démarche", reconnaît la commerçante. La Cantine du 18 prévoit de mettre en place de nouveaux projets solidaires: des ciné-clubs, mais aussi des cours de cuisine pour enfants et adultes à destination des plus démunis.
Raison sociale : SASU
Activité : restauration
Ville : Paris (XVIIIe)
Création: 2013
Présidentes : Dounia Mebtoul, associée, 26 ans et Malika Mebtoul, 48 ans
Effectif : 6 salariés
CA 2018: NC