Logiciels de caisse certifiés : l'administration fiscale accompagnera et ne sanctionnera pas les entreprises
Publié par Mallory Lalanne le | Mis à jour le
Depuis le 1er janvier 2018, les professionnels doivent utiliser des systèmes de caisse certifiés. Dans les faits, peu d'entreprises sont préparées à cette obligation. Face à ce démarrage chaotique, l'administration fiscale privilégiera, en 2018, l'accompagnement plutôt que la sanction.
Fin 2015. C'est la douche froide pour les entreprises. Le gouvernement adopte l'article 88 de la loi de finances pour 2016 qui prévoit l'obligation pour les commerçants de se doter de logiciels de caisse certifiés. Un dispositif applicable au 1er janvier 2018. Son objectif est simple: lutter contre la fraude à la TVA, qui représenterait une perte de 17 milliards d'euros pour l'État. Ce texte visait initialement les logiciels de caisse, mais aussi ceux de comptabilité et de gestion.
En juin 2017, le nouveau gouvernement, sous la houlette de Gérald Darmanin, ministre de l'Action et des Comptes publics, opère un revirement radical. Il décide de recentrer le dispositif pour le simplifier. Ainsi seuls les logiciels et systèmes de caisse sont concernés. La mesure vise tous les assujettis à la TVA: les commerçants, restaurateurs et de façon plus large les professionnels travaillant avec des clients particuliers, de façon régulière ou temporaire.
"Le champ d'application est assez vaste, reconnaît Olivier Missemer, expert-comptable au sein du réseau Incivo. Les commerçants, les sites e-commerce, les franchisés et commerces associés, les artisans du BTP qui travaillent avec des particuliers, les transports, taxis, VTC, les entreprises industrielles et les prestataires de services soumis à la TVA entrent dans le champ d'application de la loi".
Un enchaînement de textes qui a créé une confusion dans l'esprit des entreprises et des éditeurs. "Cette nouvelle réglementation est complexe. Même si sa finalité est positive, il reste aujourd'hui de nombreuses confusions et les entreprises, notamment les plus petites, sont préoccupées : coût d'un changement de caisse, transfert des données, mise en conformité, temps de formation... Les éditeurs s'interrogent également sur l'attestation à établir", déclare William Nahum, président de l'Académie des Sciences et Techniques Comptables et Financières, qui a organisé jeudi 11 janvier 2017 un colloque autour des systèmes de caisse.
Pas de contrôles inopinés
Ce n'est donc que récemment que les principaux concernés ont pris la mesure du texte. Face à ce loupé, l'administration fiscale a annoncé vouloir faire de la prévention et de la pédagogie. "Il est parfois compliqué de savoir si on est concerné, reconnaît Maïté Gabet, chef contrôle fiscal à la direction générale des finances publiques (DGFiP). Une instruction est en cours de rédaction, et sera partagée avant le printemps 2018" après consultation des parties prenantes (Medef, CPME, Académie des Sciences et Techniques Comptables et Financières).
"Cette mesure d'accompagnement ne consiste pas à reporter l'obligation. Nous sommes bien conscients de la complexité de la mesure. Plusieurs clarifications doivent être apportées. Il y aura donc une mise en oeuvre mesurée de la loi", renchérit Marie Magnien, cheffe de bureau, service du contrôle fiscal expertise juridique au sein de la DGFiP.
L'administration fiscale a par ailleurs annoncé que "les contrôles inopinés qui peuvent paraître intrusifs" ne seraient pas mis en oeuvre en 2018. "Les vérifications opérées porteront sur la détention d'un certificat ou d'une attestation. Si le système de caisse n'est pas conforme, nous serons mesurés dans l'application de la sanction. On tiendra compte de la bonne foi et des démarches engagées par l'entreprise pour se placer sur une trajectoire de mise en conformité", poursuit Marie Magnien. Toute preuve et éléments factuels (prise de contact avec l'éditeur, mails envoyés, demande de devis, versement d'un acompte) seront donc les bienvenus.
Une conformité à prouver
Pour rappel, la loi prévoit que tout assujetti à la TVA, qui enregistre des ventes de biens ou de services à des particuliers, doit produire une attestation ou un certificat garantissant que son logiciel ou système de caisse est conforme aux exigences de l'Administration fiscale.
Sont directement concernées les entreprises et certaines entités publiques assujetties à la TVA. Et, ainsi, tous les logiciels ou systèmes enregistrant des opérations avec des clients particuliers : logiciels de comptabilité, logiciels de facturation, CRM, sites de e-commerce... Il convient donc de ne pas tenir compte de la qualification du logiciel (de caisse, comptable ou de gestion), mais de retenir sa fonctionnalité de caisse. Ainsi, un logiciel de gestion qui permet l'enregistrement des opérations de ventes ou de prestations de services qui concernent les non assujettis à la TVA (clients particuliers) doit être considéré comme visé par le dispositif.
Les professions médicales, l'enseignement, les prestations exclusivement réalisées en B to B (professionnels), les micro-entrepreneurs sont exonérés. "Nous n'avons pas encore de précisions sur le niveau de chiffre d'affaires et le seuil maximal au-delà duquel les micro-entrepreneurs ne seraient plus concernés", s'interroge Olivier Missemer. Des précisions qui seront sans nul doute apportées par l'instruction.
4 conditions à respecter
Les professionnels doivent donc vérifier auprès de leurs éditeurs ou d'un organisme accrédité (Laboratoire National de Métrologie et d'Essais ou l'AFNOR) que leur solution de caisse, de gestion ou de compatbilité est bien conforme aux exigences de la nouvelle loi, et exiger les certificats ou attestations qui le garantissent.
Cette conformité impose le respect de 4 critères définis par l'administration fiscale :
- l'inaltérabilité des données d'origine avec détail daté des opérations et corrections
- la sécurisation des données d'origine et des modifications
- la conservation des données pendant 6 ans
- l'archivage annuel ou par exercice qui consiste à générer un fichier des données du logiciel ou système de caisse