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Comment réussir votre campagne de crowdfunding

Publié par Mallory Lalanne le - mis à jour à

Renforcer sa trésorerie, tester ou financer un projet... Les campagnes de financement participatif sont une aubaine pour les entreprises à la recherche de soutien financier, et de solutions complémentaires aux banques. Voici les retours d'expérience de cinq commerçants qui ont récolté de jolis magots.

Sans trop y croire, Gilles Chevillon, gérant du bar-tabac Le Davidoff situé à Saint-Étienne, a décidé, en avril dernier, de lancer une ­campagne de crowdfunding sur la plateforme de prêt Unilend. L'enjeu était colossal, puis­qu'il s'agissait de sauver son commerce du redressement judiciaire. Ni plus, ni moins. " Les banques ne souhaitaient plus négocier mon découvert mensuel de 10 000 euros. Initialement réalisés tous les quinze jours, les achats de stocks, notamment de cigarettes, sont devenus mensuels, entraînant des frais financiers élevés. Il me fallait trouver une solution immédiate pour soulager ma trésorerie " , confie Gilles Chevillon.

Le dossier rempli et la capacité d'autofinancement présentée pour rassurer la communauté, le commerçant a su en moins de dix jours que son projet était retenu. Quarante-huit heures après le lancement de la campagne, il a remporté le jackpot. Plus de 25 000 euros ont été financés par 236 prêteurs (au taux de 8,1 %). Le commerçant a choisi la durée de son prêt -36 mois-. Les prêteurs ont, quant à eux, proposé des taux d'intérêt (entre 4 et 10 %), puis la plateforme a retenu les meilleures offres. " Ce système est intéressant puisqu'il permet de lever sur une durée relativement courte - une semaine en moyenne - une grosse somme, à des taux d'intérêt plus intéressants que les établissements bancaires " , confie Nicolas Lesur, fondateur de la plateforme Unilend.

Une communication efficace

Une complémentarité aux offres bancaires, c'est aussi ce que permet le crowdfunding en don contre don. " Les deux premières vertus de cet outil, c'est de préfinancer la production et d'évaluer à moindres frais le potentiel commercial d'un projet", estime Pierre Préjean, président du comité financement du conseil ­supérieur de l'ordre des experts-comptables. Philippe Roger, créateur et gérant du Wave Surf Café, a mené une campagne de financement participatif sur la plateforme Bulb in Town trois mois avant l'ouverture officielle de son concept. C'était en mars 2015. " En plus de ­financer notre équipement bar, cela nous a permis d'offrir des préventes à l'avance et de nous faire connaître dans la région bordelaise. Chose qui a totalement fonctionné puisque le buzz a dépassé les frontières ­régionales. Nous avons bénéficié de nombreuses retombées presse " , confie le commerçant qui a récolté en 75 jours la somme de 18 500 euros contre les 17 000 initialement prévus.

Pour Nicolas Rohr, cofondateur de la marque de chaussures Faguo, qui a mené une campagne en mai 2015 sur la plateforme KissKissBankBank, le crowdfunding a été pour lui une façon d'évaluer le potentiel commercial de l'ouverture de sa première boutique au coeur de Paris, et de repérer d'éventuelles failles. " Nous avons notamment décidé après avoir sollicité l'avis des internautes d'installer dans la boutique une carte des plantations dédiée aux arbres " , confie ­Nicolas Rorh. Le concept de la marque reposant sur une démarche responsable : à chaque paire de chaussures achetée, un arbre est planté. Des ajustements qui ont été possibles grâce à l'effort de communication du gérant.

" Une campagne de crowdfunding demande du temps, entre 30 minutes et une heure par jour. Il faut répondre aux interrogations des internautes, publier des messages sur Facebook, envoyer des e-mails, déposer des flyers dans les boîtes aux lettres... " , poursuit le jeune dirigeant.

Fédérer un maximum de proches

Au démarrage de la campagne, les proches de l'équipe sont un élément-clé dans la réussite du projet. Ce premier cercle permet d'atteindre très rapidement les amis d'amis, puis le grand public. "Les proches sont les premiers relais et soutiens de la campagne. Tout se joue la première semaine" , se souvient Pierre-André Aubert, gérant du restaurant solaire Le Présage à Marseille. Son entourage lui a amené, via la plateforme Ulule, plus de 2 000 euros les trois premiers jours de la campagne. Et comme le succès ne tombe pas du ciel et qu'il lui fallait réunir la somme de 8 600 euros pour terminer son fourneau avec four statique et chauffe-assiettes, il a aussi arpenté les marchés de sa région pour réaliser des démonstrations de cuisine solaire une fois par semaine.

" Le crowdfunding, c'est de l'argent mais surtout une communauté. Il faut la tenir informée de l'avancée des projets mais aussi échanger avec elle après. Car ces personnes peuvent devenir de futurs clients tout en apportant des contacts. Si demain je recherche un menuisier, j'envisage de solliciter la communauté" , poursuit Pierre-André Aubert.

Pour réussir sa campagne, cet entrepreneur a aussi misé sur une vidéo efficace de moins de deux minutes, ciblée sur l'offre. Il a pour cela glané des contacts auprès de la couveuse Inter-Made spécialisée dans l'économie sociale et solidaire. Pour que cette opération ne lui coûte quasiment rien, le commerçant a ainsi initié un partenariat avec une télévision web participative locale qui a réalisé la vidéo. " Nous avons en échange préparé des mets pour le banquet d'inauguration de la télévision " , ajoute Pierre-André Aubert.


Des contreparties qui créent du lien

Dernière clé de réussite : des contreparties fiables. "Nous constatons trop souvent que les commerçants souhaitent donner en contrepartie des bons de réduction, mais ce n'est pas assez concret. Un boucher peut envisager en contrepartie d'un don de 10 euros proposer trois steaks hachés. Pour 50 euros, il peut offrir un dîner barbecue ou pour 150 euros la visite d'une ferme d'un producteur" , donne en exemple Alexandre Laing, cofondateur de Bulb in Town.