Zoom sur le contrat de franchise
Publié par Véronique Méot le - mis à jour à
Le contrat de franchise est un élément essentiel. C'est lui qui définit précisément les termes de la relation avec votre franchiseur. Ainsi, il est important d'exiger des clauses claires et précises pour éviter les futurs litiges.
Le contrat de franchise est "intuitu personae", c'est-à-dire conclu entre deux personnes physiques : le franchiseur et le franchisé. Pour Me Martin Le Pechon, avocat spécialiste de la franchise du cabinet éponyme, "il est important de vérifier que le contrat définit clairement les obligations de chacun".
Pour le franchiseur, celles-ci sont de trois ordres. En premier lieu, la transmission du savoir-faire au franchisé qui se matérialise par la remise d'un manuel, dont l'existence doit être mentionnée dans le contrat. Le document décrit la façon dont le savoir-faire est transmis, le franchisé étant tenu de l'appliquer. Une clause doit décrire l'organisation de la formation du franchisé et sa durée : les cours théoriques (achats, vente, gestion, management) et la pratique (mise en situation dans un magasin pilote).
Le contrat doit également stipuler la nature de l'assistance fournie au démarrage, en mentionnant le nombre de jours de présence d'un animateur réseau dans le magasin, ou les outils pour créer du trafic à l'ouverture (PLV, publicité). Ces éléments permettent d'évaluer le sérieux de l'accompagnement proposé.
Le franchisé, quant à lui, s'engage à s'impliquer dans la gestion du point de vente. "Si un investisseur place sa belle-soeur à la tête d'un magasin et qu'elle n'a pas suivi les formations imposées par le réseau, le franchiseur peut reprocher à son franchisé, notamment en cas d'échec, de ne pas avoir géré directement son point de vente", prévient Me Olivier Deschamps du cabinet d'avocats Fourgoux & Associés.
Le contrat de franchise encadre également l'exercice de votre activité par le biais de clauses. Me Olivier Deschamps attire l'attention des futurs franchisés, à titre d'exemple, sur "les réseaux qui ne proposent qu'une exclusivité d'enseigne, mais pas de produits". Même si le franchisé est le seul à exercer sous enseigne dans un territoire donné, des magasins multimarques peuvent distribuer les mêmes produits dans sa zone de chalandise.
Soyez vigilant sur les clauses
La clause d'exclusivité doit également apparaître dans le contrat avec, en annexe, la carte précise de la zone concernée. Il est important de mentionner l'interdiction de démarcher des clients hors de sa zone. Soyez également attentif aux règles d'approvisionnement. Le franchiseur vous impose-t-il de lui commander 100 % de vos achats ? Si c'est le cas, veillez à la présence d'une contrepartie : une centrale d'achats, capable de négocier des conditions avantageuses, ou une centrale de référencement qui vous indique des noms de fournisseurs et des références produits à distribuer.
Par ailleurs, la durée moyenne des contrats est estimée à cinq ans, dix ans dans certains secteurs comme l'hôtellerie où les investissements sont élevés. À son terme, le franchiseur peut décider de ne pas poursuivre la relation. Le franchisé ne dispose alors d'aucun recours pour s'opposer à cette décision. Vous devez donc vérifier que la durée du contrat sera au moins équivalente à la durée de l'amortissement de l'investissement ! À ce sujet, Me Martin Le Pechon recommande d'observer certains détails à la loupe. Par exemple, la fréquence de paiements et le mode de calcul des redevances doivent être mentionnés avec précision. "Dans le cas d'une redevance fixe et non assise sur le chiffre d'affaires, le paiement est parfois exigé dès le premier mois de l'activité, ce qui grève la trésorerie du magasin dès son ouverture", prévient-il. Faites donc attention tous les détails.
Anticipez la fin du contrat
Vous devez également penser à la sortie du contrat dès sa signature. Vérifiez d'abord que le franchiseur s'engage à vous prévenir au moins six mois avant la fin du contrat. En cas de non renouvellement de sa part, pourrez-vous continuer d'exercer votre activité dans votre local commercial sous une autre enseigne ? En général, à la fin du contrat, le franchisé doit abandonner tous les signes distinctifs de son appartenance au réseau, mais peut conserver son point de vente.
Le contrat de franchise peut contenir une clause de non concurrence post-contractuelle qui concerne la nature de l'activité (l'ancien franchisé n'a pas le droit d'exercer une activité concurrente), une partie de l'activité, ou la territorialité (l'interdiction est valable uniquement dans une zone définie). "Sa durée et sa portée doivent être fixées dans des limites raisonnables", précise l'avocat Martin Le Pechon.
Mieux vaut néanmoins vous protéger en optant pour un contrat qui substitue une clause de non affiliation à la clause de non concurrence. Dans ce cas, le franchisé n'a qu'une seule interdiction : il ne peut pas rejoindre un réseau concurrent pendant une durée de deux ans environ. Reste que la portée des clauses de non concurrence et de non affiliation est aujourd'hui discutée, au regard de plusieurs décisions de la Cour de cassation et, dans le domaine de la distribution alimentaire, par l'Autorité de la concurrence qui a rendu un avis défavorable (avis du 7 décembre 2010). Cependant, selon Me Martin Le Pechon, "la licéité et la légitimité de ces clauses ne sont pas discutables dès lors qu'elles sont proportionnées et nécessaires à la protection du concept et du savoir-faire du franchiseur. Ce principe est consacré par la Cour de cassation notamment au travers d'un arrêt du 31 janvier 2012. Ces clauses ne doivent jamais empêcher de manière absolue le franchisé d'exploiter son fonds de commerce à l'issue du contrat (Cour de cassation, 18 décembre 2012). Le franchisé doit être parfaitement conscient que sa tête de réseau doit pouvoir éviter la dispersion des éléments qui caractérisent son concept."
Autre composante sur laquelle vous devez être vigilant : si vous souhaitez vendre votre fonds de commerce et que votre contrat contient une clause d'agrément, vous devrez, au préalable, obtenir l'accord du franchiseur. S'il possède un droit de préemption sur le point de vente, il est prioritaire pour le racheter. Cette clause permet ainsi aux réseaux de conserver des emplacements porteurs et des entreprises rentables.
Enfin, vous devez prévoir les cas où le contrat peut être rompu par une clause de résiliation. Celle-ci intervient dès lors qu'une obligation essentielle n'est pas respectée par l'une des deux parties. "Généralement, les contrats prévoient une clause de résiliation de plein droit et établissent une liste des manquements contractuels qui permettent de la faire jouer", conclut Me Martin Le Pechon.
Selon un arrêt rendu par la Cour d'Appel de Chambéry le 7 novembre 2013, relatif à l'article L.7321-2 du code du travail, les dispositions permettant à un commerçant indépendant - ayant signé un contrat de distribution (franchise ou commission affiliation par exemple) - de se prévaloir de sa qualité de salarié sans lien de subordination (gérant de succursale), est en principe réservé aux personnes physiques. Sauf si le gérant d'une personne morale démontre qu'il existe un véritable lien direct et personnel entre lui et le fournisseur, la société commerciale n'étant qu'une société écran.
" Cet article, qui était une plaie pour les franchiseurs, voit sa portée réduite puisque l'arrêt de la Cour d'appel de Chambéry exclue les sociétés ", commente Jean-Baptiste Gouache, avocat, associé du cabinet Gouache avocats à Paris. " La décision représente une belle avancée en matière de sécurité juridique pour les futurs franchiseurs ", ajoute l'avocat. Pour rappel, les franchisés doivent saisir le Conseil de Prud'hommes et prouver trois conditions cumulatives pour se prévaloir du statut de salarié : l'exercice de leur activité dans un local agrée par le franchiseur, la vente de manière quasi exclusive de marchandises fournies par le franchiseur et enfin des conditions de revente ou des prix fixés par les franchiseurs.